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Parcours atypique : reprendre ses études à 50 ans

Philippe Marquet est consultant sécurité pour l’antenne lyonnaise d’Orange Cyberdefense. C’est après une première carrière en tant d’ingénieur qu’il reprend ses études pour se reconvertir dans la cybersécurité, et ce, à cinquante ans.

En 1990, tu t’inscris à un BTS comptabilité et gestion des PME. Pourquoi avoir choisi ce cursus ?

A Bourg-en-Bresse, où j’ai grandi, il n’y avait que deux choix : la comptabilité ou le droit. A l’époque, on ne se déplaçait pas beaucoup pour faire des études. J’ai alors choisi la comptabilité, même si ça n’a jamais été une passion.

Tu as commencé ta carrière en tant que formateur informatique avant de devenir technicien d’assistance téléphonique. Peux-tu nous en dire plus ?

Je n’ai jamais été comptable de manière officielle, même s’il m’arrive, encore aujourd’hui, de donner des coups de main quand je le peux. Par contre, j’ai été formateur en comptabilité dans un centre pour adultes en reconversion professionnelle. En plus de la comptabilité, j’ai aussi donné des cours de bureautique et d’informatique. C’est un travail que j’ai trouvé un peu par accident même si j’ai toujours eu envie d’enseigner. Encore aujourd’hui, c’est l’une des choses que je préfère : transmettre et rendre autonome.

As-tu toujours aimé l’informatique ?

J’ai toujours adoré ça. Ma première machine était un ZX81. Je l’ai eu en classe de quatrième, c’était génial. J’aimais aussi démonter et remonter les ordinateurs, savoir ce qu’il y avait à l’intérieur. Ça ne m’a pas quitté : quand je travaillais chez Cegid, j’avais aussi pour mission de sélectionner (et de démonter) les machines pour savoir si elles tenaient la route avant de les proposer aux clients.

Tu deviens ensuite ingénieur d’études des systèmes et réseaux, poste que tu occupes pendant presque 20 ans. A quoi ressemblait ton quotidien ?

Cegid crée et vend des logiciels à des entreprises. Mon équipe avait pour objectif d’effectuer des tests de montée en charge pour voir s’ils étaient résistants. Le travail avec des équipes variées et la traque des dysfonctionnements sont mes meilleurs souvenirs de ce poste. Nous faisions également beaucoup de veille technologique.

Qu’est-ce qui t’a poussé à changer de métier ?

Le besoin de faire autre chose et de découvrir d’autres domaines. Il n’y a pas vraiment eu d’élément déclencheur ; je me suis levé un matin et me suis dit qu’il fallait que ça change.

Pourquoi avoir choisi la cybersécurité ?

C’était la suite de logique de mon parcours. Chez Cegid, nous en faisions déjà, même si cela restait embryonnaire en comparaison de ce qui se fait aujourd’hui. C’est également un domaine porteur, et passionnant.

Tu reprends tes études en suivant un master en cybersécurité labélisé par l’ANSSI. Comment as-tu connu cette formation ?

Un ami qui suivait déjà le cursus m’en a parlé. Le programme correspondait à mes attentes, mais si j’avais le profil, il me manquait le diplôme. Mon BTS comptabilité a été un frein ; j’ai passé une batterie d’entretiens et j’ai finalement été pris. Les enseignements étaient très variés : du droit à la gestion de risques en passant par le langage R, la gestion de projet ou la cyber-résilience. Des sujets passionnants.

Comment étaient organisés les cours ?

Les cours avaient lieu tous les soirs de la semaine de 18h à 21h mais aussi certains samedis matin.

Comment as-tu concilié vie professionnelle, personnelle et reprise d’études ?

Ma famille a joué le jeu. Il faut dire que nous étions trois étudiants à la maison : mes deux enfants, de 19 et 21 ans, et moi. Ça a été une année très intense : le week-end, il faut réviser, préparer les projets. Je n’avais plus de soirées. J’ai tout de même adoré cette expérience. Les profils étaient diversifiés, tous les élèves travaillaient aussi, cela permettait de partager nos expériences.

Quels conseils donnerais-tu à quelqu’un qui souhaiterait se reconvertir à 50 ans ?

Il faut avoir une bonne organisation et se connaître : après 30 ans sans être allé à l’école, il n’est pas toujours simple de réussir à réapprendre par cœur une montagne d’informations. Il faut trouver des méthodes de mémorisation qui correspondent vraiment à soi mais aussi se faire confiance : l’expérience permet parfois de mieux appréhender les nouveaux concepts.

Je conseillerais également de bien préparer son projet : se renseigner auprès de professionnels, se projeter au-delà de sa formation. Lorsque j’ai cherché la mienne, j’ai contacté un maximum d’experts et d’entreprises, j’ai réalisé une véritable étude de marché. Même si je ne savais pas précisément vers quel métier je me tournerai, mon dossier était solide et j’ai été accepté.

En 2018, diplôme en poche, tu deviens correspondant sécurité des SI. Comment as-tu vécu cette première expérience dans la cybersécurité ?

Cela a été une très bonne expérience : concrètement, le correspondant sécurité des SI est le bras opérationnel du RSSI*. Ça a été une belle mise en pratique de tout ce que j’avais appris lors de ma formation.

La réalité du terrain était-elle proche de l’idée que tu t’en faisais ?

Je connaissais déjà l’entreprise puisque j’y suis resté plus de 20 ans : presque toutes les briques qui la construisent sont passées par mes mains. Donc ce terrain-là, je le connaissais bien. Et c’est justement ce qui me manquait, de nouveaux terrains de jeux.

En novembre 2018, tu rejoins Orange Cyberdefense en tant que consultant en sécurité des SI. Connaissais-tu notre entreprise ?

Cegid travaillait avec Orange Cyberdefense, c’est d’ailleurs grâce à ce partenariat que j’ai connu l’entreprise. J’ai été surpris par la diversité des métiers représentés et je l’ai rejointe en tant que consultant.

Quelles sont tes missions aujourd’hui ?

Ce sont plutôt des missions d’accompagnement : RSSI à temps partagé, coaching sécurité…  Je participe également ponctuellement à des missions de gestion de crise et de cadrage RGPD. Je suis très souvent chez mes clients, trois principalement.

A quoi ressemble ton quotidien ?

Il est très varié et passionnant. Je travaille autant pour le secteur privé que les administrations, avec des développeurs, des chefs de projet, des administrateurs systèmes, des DPO** ou des DSI***. Mes premières missions ont fait que je me suis beaucoup déplacé mais l’intégration dans l’équipe lyonnaise est restée très simple.

Que préfères-tu dans ton métier ?

Le partage, la transmission et la diversité des entreprises.

Travailles-tu en équipe ?

Je suis plutôt seul sur mes missions actuelles mais j’appartiens à l’équipe Conseil et Audit de Lyon où je me sens intégré.

Quels sont tes liens avec les autres antennes d’Orange Cyberdefense (Paris, Rennes, Bordeaux…) ?

J’ai des liens avec l’antenne de Paris, notamment sur les questions du droit de la cyber, mais pas autant que je le voudrais, seulement par manque de temps.

Selon toi, quelles sont les qualités d’un bon consultant ?

L’écoute, l’empathie, l’esprit de synthèse, la capacité de reformulation, le goût pour le changement et il faut aussi des compétences techniques.

Comment vois-tu ton avenir ?

Je suis en pleine découverte de ce métier, et j’évolue dans une équipe dynamique et jeune. Je m’y plais beaucoup. Mon manager est bienveillant. Je ne suis pas inquiet pour mon avenir : je découvre chaque jour la diversité de ce domaine, ça me plaît. La seule chose sûre c’est que je veux continuer de transmettre, je ne vois pas mon avenir sans cela.

Qu’aimes-tu faire en dehors du travail ?

Je participe au développement de l’activité de mon épouse, qui est tapissier-décorateur. J’accompagne également de jeunes étudiants en master RSSI chez OpenClassRooms et au CESI***. J’aime aussi les randonnées en montagne pour trouver le calme et un horizon ouvert.

Notes

*Responsable de la sécurité des systèmes d’information

**Data Protection Officer

***Directeur des systèmes d’information

**** Centre des études supérieures industrielles